Contes de coeur de Papiguy

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LES CERFS-VOLANTS DE LA PAIX

 

Les 3 frères n°4 : LES CERFS-VOLANTS DE LA PAIX

Dans les épisodes précédents : Les trois frères Canfield, ont pris le train qui les mène de Montpellier à Marvejols en Lozère. Polo raconta l’amitié avec son chien. Jack raconta comment il avait trouvé la parole d’or. Dany conta comment il avait chassé des soupirs. Mais Dany avait d’autres histoires dans son sac…

- "Vos billets s'il-vous plait!" annonça le contrôleur des trains.

- « Combien de temps pour aller jusqu'à Marvejols ? »

- « Oh vous en avez bien pour trois heures avec changement de train à La Bastide. »

- « Merci, monsieur… Alors Dany, tu nous racontes la suite ? Quand tu es parti, tu avais un cerf-volant. Qu’est-ce que tu en as fait?

- Oui ! Un bien drôle de cerf-volant qui m’a amené jusqu’en Californie. Mais avant de vous raconter comment je me suis retrouvé si loin, je voudrais vous raconter une histoire qui m’est arrivée avec ce cerf-volant quelques années auparavant quand j’étais au Lycée.

 

 

 

 

 

 

De l’internat de garçons de Montpellier, je suis parti dans une École Nationale Professionnelle du Nord de la France. J’ai traversé toute la France en train, avec cet encombrant cerf-volant en plus de ma valise ! Dans cette école, près de Lille, j’ai connu mon copain P’tit Louis.

          P’tit Louis m’a invité à venir chez lui un week-end. Nous avions tous les deux 14 ans. Son pays était un pays de vent, au bout du monde.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Aussi j’emmenai mon cerf-volant pour jouer.

 

 

 

Ses parents habitaient dans la campagne aux abords d’une petite ville appelée Titsynthe.

 

 

En fait, il y avait deux petites villes séparées par un canal et reliées par un grand pont en fer. D’un côté Titsynthe, de l’autre côté Pinsol sur Mer.

Les gens de Titsynthe étaient tous très rouges et parlaient très fort avec des voix rauques qui faisaient un peu peur. Ils n’étaient pas méchants, mais ils avaient la voix rauque. Les gens de Pinsol, eux, avaient des visages plutôt verdâtres, parlaient par le nez. Cela leur donnait des voix nasillardes. Quand ils se parlaient dans le bus, cela faisait un concert rigolo, avec des voix en trompettes bouchées, et des voix en guitare basse d’orchestre rock.

P’tit Louis, était un rougeaud de Titsynthois. Il me présenta son copain Till, un verdâtre de Pinsolois. Nous jouions au cerf-volant sur les bords du canal.

 

 

Je leur ai demandé : « Mais pourquoi tous les verdâtre étaient d’un côté du canal et les rougeauds de l’autre côté ? »

 

 

 

 

 

          P’tit Louis me raconta l’histoire incroyable qui s’était déroulée quand il était petit. À cette époque, la ville s’appelait « Dunesjaunes ». Elle englobait les deux rives du canal. Les rouges et les verts vivaient ensemble dans les mêmes quartiers. P’tit Louis et Till étaient voisins. Ils allaient à la même école. Leurs familles pique-niquaient souvent ensemble. Les deux amis, inséparables, faisaient beaucoup de choses ensemble : jouer au ballon, lire, s’allonger dans la prairie et regarder les nuages, courir derrière les papillons, chanter sur leur vélos, siffler avec les oiseaux, dessiner, faire voler leur cerf-volant très haut dans le ciel. Ils vivaient une enfance heureuse et confiante. Un ami rend la vie pleine de couleurs.

Mais, un jour, une dispute très violente éclata entre un homme rougeaud et un homme vert.

 

 

L’homme rougeaud se fâcha très fort. Il devint encore plus rouge. Il hurlait comme une sirène de Pompiers. Ses yeux sortaient de sa tête et lançaient des éclairs

 

 

 

 

 

Il décida que tous les gens verts étaient ses ennemis. Sa colère était tellement puissante qu'elle souleva d'autres colères. Quelques mois plus tard, les gens rouges se battaient contre les gens verts, dans les rues, dans les banques, dans les parcs, dans les magasins.

 

 

 

 

 

Les enfants étaient enfermés à la maison. Ils n’allaient plus à l’école. Les parents leur disaient que c’était dangereux de sortir, et les enfants pleuraient beaucoup.

 

          Des gens importants essayèrent de calmer les deux camps mais rien n’y faisait. Les tensions devenaient de plus en plus fortes. Les rougeauds ne supportaient plus les verdâtres. Les verdâtres ne supportaient plus les rougeauds. Ils ne voulaient plus vivre dans les mêmes lieux ensemble. Ils ne voulaient plus prendre les mêmes bus, ni aller dans les mêmes magasins. Les policiers verts se battaient contre les policiers rouges ! La nuit, les parents faisaient des cauchemars de guerre.

          Alors les grands chefs décidèrent de ne plus vivre ensemble. Ils coupèrent la ville de « Dunesjaunes » en deux. Le canal serait la frontière à ne pas dépasser. Ils construisirent un mur au milieu du pont. Un mur très haut. On ne pouvait plus passer de l’autre côté.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Beaucoup de gens furent obligés de quitter leur maison pour aller de l'autre côté de la ville. Beaucoup perdirent leur travail, leurs amis.

          Les parents de P’tit Louis étaient tristes d’être séparés de leurs voisins. Toutes les personnes de bonne volonté étaient forcées de se séparer. Le cœur de P’tit Louis pleurait sans cesse : son meilleur ami était de l'autre côté !

         

 

Il partait le matin pour l’école. Dans la rue, tout le monde était rouge. Dans la classe, tous les enfants étaient rouges.

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DU ROUGE PARTOUT!

les enfants n’étaient pas d’accord du tout avec ce qui se passait.

Ils étaient si heureux d'avoir des amis de toutes les couleurs ! Pourquoi ne pas être content de toutes les couleurs ? Pourquoi ne pas s’accepter les uns les autres ?

L’oncle Rémy qui était manchot depuis la dernière guerre se plaisait à dire : « dans une main, chaque doigt est différent, singulier, et pourtant c’est l’assemblage de tous les doigts qui fait que la main fonctionne ! ».

Mais que faire ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Souvent P’tit Louis s’asseyait au bord du canal et regardait les fenêtres des immeubles de l’autre côté. Il imaginait les personnes derrières les vitres.

Il cherchait des signes de Till. Qu’est-ce qu’il faisait ?

Un jour, des mouettes volaient en planant, au gré du vent, et passaient d’un bord à l’autre du canal. En les voyant, il se dit : «  Si seulement nous pouvions voler ! Nous pourrions passer au-dessus du canal et jouer avec nos amis de l'autre côté ! ».

Et là, il eût une idée ! : « Pourquoi ne pas construire un cerf-volant pour communiquer avec Till de l'autre côté du mur ?

Il ne pouvait pas voler mais au moins, il pourrait dire à son ami combien il pense à lui, et ils pourraient jouer ensemble dans le ciel avec leur cerf-volant ! »

          Aussitôt dit, aussitôt fait. P’tit Louis construisit un très grand cerf-volant arc en ciel. Il demanda à sa maman d’écrire dessus : « BONJOUR ! ».

Tous les jours, après l'école, il allait au bord du canal faire voler son cerf-volant.

 

 

 

Trois jours passèrent. Pas de réactions.

Le quatrième jour, des enfants rouges amenèrent leurs cerfs-volants de toutes les couleurs et firent voler leurs cerf-volant à côté de lui..

Mais de l’autre côté du canal toujours pas de réactions.

Le sixième jour, les premiers cerfs-volants d’enfants verts apparurent dans le gris du ciel ! Les enfants avaient tout de suite compris et s’envoyaient des messages dans le ciel.

C’était magnifique de pouvoir se témoigner son amitié, ainsi, dans le ciel !

P’tit Louis revint tous les jours après l’école.

Mais toujours pas de réponse de Till.

P’tit Louis rentra, gris de déception.

 

 

 

 

 

 

 

Son père le vit et lui expliqua «  Tu sais, mon fils, on dit que le ciel est tout gris dans ce coin de France, car il est chargé des humeurs des humains.

 

 

 

Mais, regardes le bien, ce ciel gris avec toutes ses nuances. Il y a des gris sombres et des gris brillants.

Ce ne serait pas possible s’il n’y avait pas une lumière derrière.

La lumière derrière, c’est le soleil, et le soleil est toujours là, même dans le noir de la nuit, se reflétant sur la lune. Il est toujours là. Et il attend. Et puis, par moment, les voiles gris s’effilochent, disparaissent et il est là, à nous faire des clins d’œil, à chauffer notre peau.

Nous devons faire pareil. Attendre le bon moment. Que les choses troubles s’éclaircissent. Et être là avec la chaleur de notre cœur, et la lumière de notre petite âme.

Quelquefois c’est long d’attendre. On a envie que cela arrive vite. Mais si l’on accepte que la couleur et le soleil soient derrière le gris, alors on peut attendre et espérer.

Et puis, peut être que Till construit un nouveau cerf-volant ? »

         

Le neuvième jour était un samedi. Ce matin-là, la maman de P’tit Louis vint le réveiller avec un grand sourire et l'envoya dehors voir ce qui se passait.

Ce n’était pas un cerf-volant qu’il y avait de l’autre côté du canal, mais des milliers de cerfs-volants, de toutes les couleurs, qui lui disaient bonjour, qui disaient bonjour à tous les autres garçons et filles rouges.

Il reconnût le cerf-volant de Till et couru vite chercher le sien.

Les enfants rouges affluaient de tous les coins avec leur cerf-volant, eux aussi.

Et bientôt mille couleurs colorièrent le ciel. Il n’y avait plus de place pour les nuages gris. Plus de place pour les colères. Plus de place pour les conflits. Juste un grand sourire d’enfant dans le ciel !

Alors il se rappela : « Un ami rend la vie pleine de couleurs. ».

Et il se dit que si nous nous acceptons tous avec la chaleur du cœur, et donnons ce que nous pouvons pour que cela se passe bien entre nous, alors il n’y a pas de raison de se disputer trop fort et de se fâcher.

 

 

          Plusieurs années plus tard, les adultes décidèrent d’enlever le mur sur le pont. Les Pinsolois et les Titsynthois purent de nouveau traverser le canal.

Mais ce ne fût plus jamais la même chose, car les blessures du cœur sont longues à se refermer.

Ainsi, le deuxième samedi d’octobre de chaque année, les enfants des deux villes se retrouvent sur les bords du canal, avec leurs cerfs-volants, et colorent le ciel de toutes les couleurs de leurs sourires.

 

 

« La Bastide, La Bastide ! Tout le monde descend ! Correspondance pour Marvejols, Clermont Ferrand sur le quai 2 dans vingt minutes. »

Et voilà, dit Dany, ma petite histoire des cerfs-volants de la paix se finit là…

Contée par Papiguy

Illustrée par Juliette

 

 



22/06/2017
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