Contes de coeur de Papiguy

Contes de coeur de Papiguy

LE VOYAGE DE JACK CANFIELD

 

Le voyage de Jack Canfield

 

 

« Le train en partance pour Marvejols est annoncé. Mesdames, messieurs les voyageurs, veuillez-vous avancer s’il vous plaît. »

 

A peine installé dans le wagon de voyageur que Jack enchaîne :

 

Comment vous dire ? C’est marrant, Polo ; tu as parlé du dialogue avec ton chien Constantin.

Moi aussi je voudrais vous faire partager un dialogue magique avec un vieil écossais qui a changé ma vie.

Cela a commencé par un évènement qui aurait pu passer pour anodin, et qui suscita un vrai déclic en moi. C'était sur le Queen Marie, un énorme navire transatlantique qui voguait vers les USA.

 

Laisser Polo seul, partir chez la vieille tante de papa, à New York, quitter le nid douillet et chaleureux pour un terrain aventureux et incertain, furent très difficile pour moi. Ce fût comme un arrachement, un choc, dont j'ai bien mis tout le voyage pour m’en remettre.  

On m'avait décrit l’Amérique comme une terre de gens incultes, fils et filles de mauvais garçons, de repris de justice, de hors la loi, qui avaient fui l’Europe pour se recréer un monde à eux.  Je me voyais déjà, mettre le pied à terre, et me faire dépenaillé, attaqué, dévalisé ! J’étais exaspéré ! Tout cela pour aller chez cette tante qui a attendu 10 ans pour nous faire signe ! Nous ne savions même pas qu’elle existait ! Pas une photo, pas un portrait d’elle dans les affaires de notre père ! Quelquefois je rêvais que c'était une sorcière qui allait m’enfermer dans un placard !

 

Bref, je n’avais pas le moral.

J’embarquais au Havre, pour New York, sur cet énorme bateau.

Et là commença la longue attente.

La traversée était longue.

Si longue

Qu'on se demandait même

S'il y avait un bout à l'océan.

 

Les parois en fer du bateau géant vibraient de sons et langues de toute l'Europe : anglais, français, italien, allemand, suédois, espagnol, yiddish, américain …

De nombreuses rencontres, des plus étranges au plus banales, scandaient le rythme de la croisière.

 

Des français bien élevés m’expliquèrent que les USA n’était plus un pays de bandits, et que la justice et la liberté y régnaient. Cela m'a rassuré et mes pensées devinrent plus légères.

 

 Je me promenais beaucoup de ponts en ponts.

 

Sur l’avant pont de la proue du bateau, il y avait un bar. Assis à toujours la même table, dans un coin discret, un vieil homme, habillé bizarrement, costume aux couleurs écossaises, visage ridé comme un vieux mouchoir chiffonné, un accent américain terriblement guttural qui vous clouait les oreilles au plafond, et un sourire tellement large qu’il ferait rougir de joie des tomates en hiver.

Tous les jours, il était assis là, dans son coin, un gros cigare vissé dans le coin droit de sa bouche, un chapeau mou enfoncé sur le côté. Il parlait peu, observait les aller et venues des passagers, et riait beaucoup.

On m’avait dit qu’il était de New York, justement la ville où je devais aller.

Je me retrouvais souvent dans sa proximité à siroter une limonade pendant qu’il fumait ses gros cigares, en lisant toujours le même journal. Quand des habitués passaient et lui demandaient ce qu’il lisait de si intéressant, il répondait : « oh ! il me protège du vent plus que de l'ignorance! »

 

Un jour, un jeune homme à peine plus âgé que moi l’approcha et lui demanda comment c’était new York. Je m’approchais et tendit l’oreille, intéressé par sa réponse.

 - « Je ne suis jamais venu à New York. Monsieur, comment sont les gens de cette ville ? »

 Le vieil homme lui répondit par une question :

 - « Comment étaient les gens dans la ville d’où tu viens ? ».

-  « Égoïstes et méchants... Et d’ailleurs j’étais bien content de partir » dit le jeune homme.

Et le vieux monsieur de répondre : « Tu trouveras les mêmes gens à New York. »

 

Deux jours plus tard, un autre jeune homme s’approcha du vieil homme et lui posa exactement la même question.

- « Je veux travailler à New York. Comment sont les gens de cette ville ? ».

- « Dis-moi, mon garçon, comment étaient les gens dans la ville d’où tu viens ? ».

- « Ils étaient bons et accueillants, honnêtes, j’y avais de bons amis, j’ai eu beaucoup de mal à la quitter », répondit le jeune homme. 

- « Tu trouveras les mêmes ici » répondit le vieil homme.

J’étais complètement décontenancé. Le vieil homme n'avait pas l'air fou, il avait l'air sincère et bienveillant. Il respirait la bonté. Peut être qu'il plaisantait ou se moquait un peu ? Heureusement pour moi, le barman qui était à coté, avait tout entendu. Il s’adressa au vieux monsieur sur un ton de reproche :

« Comment pouvez-vous donner deux réponses complètement différentes à la même question posée par ces deux jeunes gens ? ».

- « Mon fils, dit le vieil homme, celui qui ouvre son cœur change aussi son regard sur les autres. Chacun porte son univers dans son cœur ».

 

Ce fût un coup de tonnerre en moi ! pourquoi je maudissais à l’avance les américains ? Tout devenait clair.

Je transportais mon monde avec moi !

Et je m’étais autoconditionné à voir le monde autour de moi, comme l’image de mes peurs et de mes désirs.  J'avais peur des mauvaises rencontres et je ne pensais qu'aux mauvaises rencontres.

Je comprenais mieux l’expression que j’avais entendu de la part d’un professeur : « On ne voit que ce que l’on veut bien voir ! »

 

Rappelez-vous, mes frères, un jour de printemps, que nous étions en montagne, un homme maigre et dépenaillé marchait au bord de la route en récitant très fort des poèmes inventés. Les gendarmes l’arrêtèrent et lui demandèrent ses papiers. Il leur répondit : « Vous n’existez pas ! Vous n’êtes pas de mon monde ! » et il avait continué son chemin, laissant les gendarmes interloqués.

Sur le coup, cela nous avait bien fait rire.

Mais sur cet océan sans limites, je compris alors que je n’allais pas vers le nouveau monde, mais que je transportais bien mon monde intérieur avec moi, avec les mêmes problèmes que je retrouverais partout où j’irais, non pas parce qu’ils viennent des lieux, de l’environnement, mais parce que les graines de ces problèmes sont semées en moi, et ne demandent qu’à germer, si les situations le permettent.

 

On ne voit que ce que l'on veut bien voir !

Ouah !...

 

Ma vision du monde est teintée par ce qu’il y a au fond de moi !

 

Ainsi, j’imaginais mon futur à New York à travers mes peurs et mes appréhensions !

Comme si, mon cœur et mon esprit, voyaient le monde à travers des verres teintés et déformants. Les informations du monde extérieur étaient colorées par mes émotions et réduites par mes croyances et mes préjugés.

Je me sentais comme un cheval qui portait les lunettes de soleil de ses émotions, des lunettes tellement foncées, que cela l’empêchait d’apprécier la lumière du jour.

En plus des lunettes de soleil, le cheval portait des œillères qui réduisaient terriblement son angle de vision des choses alentour. Des œillères ? Oui, les œillères fabriquées par mes croyances, mes attentes, mes superstitions, mes préjugés.  

Je compris alors, comme une fulgurance, que nos perceptions des choses autour de nous, sont réduites. Notre façon d’imaginer le futur est complètement orientée, conditionnée par nos croyances.

Du coup, nos mondes sont petits, petits !

Vus de l’océan, nous sommes des bactéries qui se débattent dans une immensité que nous faisons semblant de ne pas connaître.

 

Ce que je m’imaginais de New York était ridicule. Il y avait urgence à « agrandir mon monde ».

 

 

Papiguy

 



24/01/2018
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